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Au micro, la voix d’Algassimou Diallo ne tremble pas. Mercredi 22 mai, en costume rouge et col d’hermine, le procureur du procès du massacre de Conakry du 28 septembre 2009 a commencé à lire les réquisitions du parquet. L’affaire est extraordinaire, rappelle-t-il : « C’est la première fois que des crimes de masse sont jugés en Guinée, la première fois qu’un ancien chef d’État est jugé. »

Pour les plaidoiries et les plaidoyers, Moussa Dadis Camara et son coaccusé sont sortis de scène ; ils sont au plus près des avocats et des magistrats, siégeant devant le tribunal. Ils sont jugés pour la répression d’un meeting de l’opposition le 28 septembre 2009 et les jours suivants. Selon le rapport, plus de 150 personnes ont été abattues ou poignardées à mort par une force composée d’éléments de la garde présidentielle, de gendarmes et de miliciens répondant aux ordres de la junte de l’époque, le Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD). d’une commission d’enquête de l’ONU.

Dadis Camara impassible

Au début de son discours, le procureur a demandé que ces tueries, meurtres, tortures, enlèvements et viols soient requalifiés en crimes contre l’humanité. Pour Dadis Camara, le principal accusé, soupçonné d’avoir ordonné le massacre, demande la réclusion à perpétuité, assortie d’une peine conservatoire de trente ans. L’ancien président reste impassible. Les yeux des autres accusés tournent de gauche à droite, l’inquiétude se lit dans leurs yeux alors que les autres phrases sont prononcées les unes après les autres. La perpétuité a également été requise contre plusieurs hauts responsables de la junte : Moussa Tiegboro Camara, ancien patron de la lutte antidrogue, Abdoulaye Chérif Diaby, ancien ministre de la Santé, Marcel Guilavogui, le protégé de Dadis Camara, Blaise Goumou, antidrogue. gendarme, Claude Pivi, ancien ministre de la sécurité présidentielle et actuellement en fuite, ainsi qu’Alpha Amadou Baldé, également en fuite.

« Les réquisitions sont à la mesure des crimes graves commis. Demander la réclusion à perpétuité contre sept prévenus est un bon signal pour dire qu’il est inacceptable que les coupables ne soient pas punis », réagit M.Et Alpha Amadou DS Bah, coordinateur du collectif des avocats des victimes. Il espère désormais que les juges confirmeront ces peines, voire les « aggraveront ».

Dadis Camara est « serein », assure son avocat, MEt Grand-père Antoine Lamah. « Il a la ferme conviction que le tribunal fera loi et prononcera inévitablement son acquittement. » Le Conseil se heurte à ce qui vient d’être dit à propos de son client, dans cette dernière phase des défenses des parties civiles et des requêtes qui durent deux semaines : « Nous déplorons la misère, tant sur le plan probatoire que juridique, des déclarations faites par le Bureau du Procureur. » Il dénonce notamment la demande du procureur de requalifier les faits en crimes contre l’humanité, qui selon lui n’est pas justifiée.

Pour Toumba, 15 ans de prison sont requis

La superstar accusée, Aboubakar Diakité, ancien aide de camp de Dadis Camara, dont certains sont devenus des mèmes sur Internet, jouit toujours d’une grande sympathie auprès du public guinéen, mais aussi bien au-delà, dans toute la sous-région. En acceptant de dire « sa version de la vérité », il a obtenu le soutien du public et a brisé la loi du silence qui entachait jusque-là l’affaire. Avec celui surnommé « Toumba », le parquet a choisi de se montrer plus clément, optant pour une peine de quinze ans de prison.

Si les avocats des parties civiles ont insisté, lors de leur défense, sur le rôle actif joué par Toumba dans le massacre, l’un d’eux, M.Et Alsény Aïssata Diallo, a demandé son acquittement. Mais le parquet a finalement décidé d’une lourde peine. « Cela a permis de sauver des dirigeants et d’aider la Cour à voir les choses plus clairement. Ce qu’on n’aurait pas accepté, c’est que le parquet ne demande aucune sanction pour lui », analyse M.Et BIEN. « Les victimes sont très soulagées, elles attendent que le tribunal entérine ces condamnations et se prononce sur les demandes d’indemnisation que nous avons avancées. » L’avocat demande une indemnisation comprise entre 100 000 et 300 000 euros, selon le préjudice. Des sommes qui, dit-il, devraient être garanties par l’Etat guinéen.

Quinze ans de prison ont également été requis contre Ibrahima Camara dit Kalonzo et Paul Mansa Guilavogui, deux militaires sans stature. C’est auprès de l’ancien garde du corps de Toumba, Cécé Raphaël Haba, et de Mamadou Aliou Keïta, que le parquet s’est finalement montré le plus magnanime. Le procureur de la République a proposé quatorze ans de prison pour tous deux, alors même qu’Aliou Keïta est accusé de viol par une victime qui l’a formellement reconnu. Le procureur a nié l’existence de circonstances atténuantes à tous les accusés.

Dadis Camara perd son sang-froid

Dans l’esprit de certains Guinéens, à commencer par ceux présents dans la salle d’audience, les réquisitions ont semé la confusion. « Les prévenus étaient choqués, ils pensaient que c’était la peine prononcée. Il leur a fallu de longues minutes d’explications pour comprendre que ce n’était pas fini », raconte M.Et BIEN. Si les demandes du parquet ont été présentées en une journée, il a fallu cinq jours d’audience pour que les avocats des plaignants s’expriment. Des souvenirs de qualité inégale, mais parfois puissants.

Le 14 mai MEt Bah parvient ainsi à déstabiliser Dadis Camara, qui perd son sang-froid. Revenant sur le contexte politique du massacre, l’avocat déclare : « Il y avait un soutien populaire à la prise du pouvoir. [par la junte du CNDD], parce que nous avons vu en le capitaine Moussa Dadis Camara un libérateur, quelqu’un qui pourrait, s’il avait été honnête et sincère, conduire ce pays vers le développement, vers des élections libres et transparentes. » A ces mots l’ancien chef de l’Etat a explosé. Il se lève et s’exclame : « Vous devez corriger votre langage ! » L’accusé est aussitôt réprimandé par le président du tribunal.

L’émotion est également palpable lors de l’intervention de M.Et Halimatou Camara, le 21 mai. L’avocate, qui a décidé de parler de la « souffrance des victimes », sa voix tremble lorsqu’elle évoque le sort d’une femme violée dans le stade. Cette dernière, qui a témoigné devant le tribunal, a déclaré avoir rencontré Toumba le 28 septembre 2009. Alors qu’elle était traînée à terre par des militaires, le chef de la garde présidentielle de l’époque n’a pas répondu. Elle est ensuite violée, avec le canon d’une arme à feu inséré dans ses parties génitales.

Tensions en défense

Le lendemain, le procureur adjoint, Elhadj Sidiki Camara, concluait son réquisitoire en évoquant le sort tragique d’une femme devenue esclave sexuelle des militaires. Il s’effondre et sanglote dans le micro. « Ce n’est pas la raison qui guidait ces demandes mais la passion », répond MEt Lamah. « La preuve, c’est qu’un substitut du procureur a fini par fondre en larmes comme s’il avait vécu les faits, au point d’adopter les déclarations de la partie civile comme si c’étaient des évangiles, il a complètement failli à sa mission. » Avant d’ajouter : « Quand on est procureur, on représente la société ; les accusés contre lesquels de fausses accusations ont été portées font partie de la société. »

Les plaidoiries de la défense ont commencé lundi 27 mai. Une vingtaine d’avocats devront prendre position. Cette dernière phase avant le jugement pourrait durer jusqu’à quatre semaines, estiment les parties civiles, alors que des tensions pointent à l’horizon concernant l’ordre de passage, les avocats de Dadis Camara et Toumba veulent tous se défendre en dernier pour défendre au mieux leurs propres intérêts. client contre les attaques venant de l’autre côté. Le président du tribunal, Ibrahima Sory II Tounkara, espère que les accusés pourront décider de leur sort d’ici la vacance judiciaire, qui débute en août.

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